Au cœur de mon aventure entrepreneuriale, il y a la volonté de revaloriser l’artisanat provençal et d’inscrire ce projet dans une économie sociale et solidaire.
Le développement de mon entreprise et la nécessité de produire à plus grande échelle m’ont conduit à réfléchir à un mode de production responsable et inclusif. J’ai alors rejoint la formation Starter dispensée par l’association marseillaise Intermade qui accompagne les entrepreneurs dans le développement social de leur entreprise.
C’est au cours de ces 3 mois de formation que j’ai découvert le travail en milieu carcéral.
Historiquement, le travail pénitentiaire s’est toujours inscrit dans une démarche punitive. Depuis 1987, il n’est plus obligatoire en détention. Le travail en prison est désormais choisi par les détenus qui se pressent sur les listes d’attente.
Malgré ses bénéfices avérés en termes de réinsertion, le travail est devenu de plus en plus rare en prison. Ainsi, la part de détenus exerçant une activité rémunérée n’a cessé de diminuer. Ce lent déclin s’est accompagné d’une dégradation de la qualité des tâches réalisées en détention. Celles-ci sont réduites à des activités de façonnage ou d’assemblage peu valorisantes. A l’heure actuelle moins d’un tiers des détenus incarcérés exercent une activité rémunérée en raison du manque d’entreprises voulant s’engager dans cette démarche.
Les retombées positives du travail en prison sont pourtant nombreuses. Des études montrent que le fait de bénéficier d’une activité professionnelle diminue en moyenne de 43 % la probabilité de retourner derrière les barreaux. La rémunération qui y est associée, bien que plus faible qu’à l’extérieur, permet au détenu d’améliorer ses conditions de vie au sein de l’établissement pénitentiaire, d’épargner en vue de sa sortie et participe à l’indemnisation des victimes.
Enfin, le bénéfice personnel est important pour le détenu qui peut parvenir à reprendre confiance en lui, à se réapproprier une discipline de vie, et être à nouveau acteur d’un projet collectif.
En 2017, je décide donc de relever le défi et met en place un atelier de fabrication de fuseaux de lavande dans un centre de détention en Provence. Malgré la singularité de ma proposition, 15 candidats se portent volontaires et c’est les bras chargés de lavandin frais que j’entame leur formation. Après des semaines à leur transmettre chaque étape et chaque geste, les premiers fuseaux de lavande parfument les ateliers de la prison et une extraordinaire aventure humaine commence.
À travers nos échanges et dans les effluves de cette plante apaisante et relaxante, l’humanité se réinstalle…
Aujourd’hui, l’atelier fuseaux a été complété par un atelier couture, avec la formation de 5 détenus qui fabriquent toute l’année une partie de mes collections. Leur cadre de travail, leur formation pouvant être valorisée à leur sortie et leur rémunération supérieure au salaire carcéral m’ont permis d’obtenir le label Pep’s. Ce label, mis en place par le ministère de la justice, récompense les entreprises ayant fait le choix d’une production en prison dans des conditions inclusives, justes et responsables.